Ces dernières années, de nombreux jeux vidéo se sont développés sur un modèle hybride, entre le jeu vidéo traditionnel et le jeu de hasard et d’argent. Le principe se nomme Free to play / pay to win : le jeu est gratuit, mais offre la possibilité de payer pour augmenter ses chances d’avancer dans l’aventure ou simplement pour améliorer l’expérience. Une stratégie gagnante pour l’industrie du jeu, aux conséquences parfois lourdes pour le joueur.
Un modèle qui favorise la dépendance?
Le phénomène du Free to play / pay to win s’est d’abord largement répandu parmi les applications mobiles de jeu, qui permettent d’avancer plus rapidement grâce à des micropaiements de quelques dollars. L’un des exemples les plus connus demeure l’application mobile Candy Crush Saga, un jeu de réflexion dont l’avancement est largement favorisé par l’investissement de micropaiements. Dans certains cas, le joueur effectue un achat dans un but précis : par exemple acquérir une nouvelle compétence ou débloquer un niveau. Mais dans d’autres, il ne sait pas ce qu’il achète. C’est le cas lorsque le jeu offre la possibilité d’acheter des loot box, des coffres à butin que le joueur peut acheter sans en connaitre le contenu : il peut s’agir de nouvelles fonctionnalités pour améliorer les performances du personnage, ou d’un simple accessoire esthétique. Un principe très proche du jeu de hasard et d’argent.
Ces nouvelles formes de jeu font l’objet de différentes études, qui visent notamment à évaluer l’impact de cette hybridation du jeu sur le développement de la dépendance. Un article publié dans la revue Addiction(s) : recherches et pratiques en décembre 2018 semble aller dans ce sens :
« En jumelant l’aspect graphique et divertissant des jeux vidéo avec l’aspect monétaire et aléatoire des jeux de hasard et d’argent (JHA), ces nouvelles formes de jeux hybrides, stimulants et accrocheurs, créent un contexte favorable à une perte de contrôle. Leur caractère immersif et chronophage, renforcé par l’incrustation de microtransactions financières dans le jeu, soulève des inquiétudes quant aux conséquences possibles sur l’individu et la société. »
Des joueurs poussés à dépenser toujours plus
Les montants investis dans ces jeux « gratuits » peuvent être de quelques dollars pour certains, plusieurs milliers pour d’autres. Prenons l’exemple de Fortnite, l’un des jeux en ligne les plus populaires au monde. S’il est possible d’y jouer gratuitement, on peut toutefois y acheter des accessoires, des skin (costumes) ou encore des pas de danse que le personnage effectue lorsqu’il remporte un combat. Ces améliorations a priori purement esthétiques ont toutefois un rôle dans le jeu. Elles peuvent permettre d’impressionner un ennemi, de s’afficher comme un joueur expérimenté ou simplement de rendre le jeu plus divertissant. Une pression communautaire peut aussi s’exercer sur les joueurs novices et les pousser à l’achat : si, par exemple, un joueur porte l’un des costumes offerts gratuitement par le jeu, il sera alors identifié comme un débutant par le reste de la communauté.
Sur Fortnite comme dans d’autres jeux, l’acte d’achat est par ailleurs facilité par l’utilisation d’une monnaie virtuelle. Ici, ce sont les V-Bucks. Une méthode qui contraint le joueur à acheter des « lots » de V-Bucks d’un certain montant, qui brouille les pistes quant à la valeur réelle des achats effectués et qui entretient l’illusion de ne pas dépenser de l’argent réel.
Si le montant des transactions effectuées dans le jeu est généralement peu élevé, c’est l’accumulation de ces transactions qui peut finir par avoir de lourdes conséquences.
« Des 3 000 $, 4 000 $, 5 000 $ investis en skins ou en objets dans un jeu, ça se peut. On voit ça régulièrement, notamment chez les adolescents. »
« Avec les jeux de hasard et d’argent, en une soirée on peut perdre sa maison. Avec les jeux vidéo on ne peut pas se rendre là. Par contre, des 3 000 $, 4 000 $, 5 000 $ investis en skins ou en objets dans un jeu, ça se peut. On voit ça régulièrement, notamment chez les adolescents, chez qui il y a moins la conscience de la dépense. » explique Miguel Therriault, coordonnateur des services professionnels aux centres de thérapie Le Grand Chemin.
Nous pouvons vous aider
Si vos habitudes de jeu ou celles d’un proche vous inquiètent, ne restez pas seul : appelez-nous au 1 800 461-0140 ou utilisez le clavardage en bas à droite du site. Nous pourrons vous offrir du soutien et de l’information personnalisés et vous référer vers des ressources adaptées à votre situation. Nos services sont accessibles 24h/24, 7 jours sur 7.